« Mauvais tsigane tu resteras »: traduction d’un article de presse locale

Encore une petite traduction d’un article de la presse locale roumaine (du département de Bihor où je travaille) au sujet des roms. Je trouve que ces petits articles (ici il s’agit en fait d’un édito sous forme de chronique ou de commentaire subjectif du journaliste) rendent très directement compte de la parole commune, de l’avis commun, souvent tu au quotidien par le clampin mais jamais sans conséquence dans les relations sociales et en particulier la relation de la société roumaine majoritaire aux roms. Je fais ces traductions pour illustrer sans trop de « filtres » la situation des roms ou, plus précisément, la situation des roumains face aux roms, là-bas, au niveau très local. Cette traduction fait suite à plusieurs billets de ce blog, n’hésitez pas à vous y référer, c’est la multiplication des articles qui peut faire imaginer leur « impact »…

L’article est intitulé « Ţigănie rai, rai care erai », un titre en forme d’expression qui m’échappe totalement, et donc que j’ai été incapable de traduire. Je m’en suis seulement inspiré, et je laisse à l’un d’entre vous de me proposer une traduction. Encore une fois, je ne suis pas maitre en la matière, ces traductions sont très imparfaites, j’en suis désolé. Mais je crois bien que je ne déforme pas le propos.

Cette article est écrit par Mircea Chirila et a été publié sur le site du journal Bihoreanul le 16 juillet 2018. La version originale se trouve ici.

Mauvais tsigane, tu resteras

Ceux qui pensent qu’en ne parlant plus du problème des tsiganes, le problème n’existe plus, se trompent. Il ne suffit pas d’être politiquement correct en les nommant « roms » plutôt que « tsiganes », cette politesse ne résout pas les malheurs du pays.

Si les frontières n’étaient pas ouvertes, que les roms ne pouvaient pas partir, conduit par la pauvreté, pour aller mendier et exploiter leurs talents dans toute l’Europe, il est certain qu’aujourd’hui, des événements comme ceux de Borod auraient été tout aussi insignifiants que fréquents. Mais que s’est-il passé à Borod? Quelques villageois qui avaient eu le toupet de surprendre des tsiganes en train de voler ont été battu par tout le camp (satra sic); également une grande première dans toute la région: les agresseurs mettaient pour la première fois la main sur des pelles, des fourches et des haches, mais pas nécessairement pour travailler.

Bien sûr, cette soupape que représente les départ des roms et des délinquants (infractori) constitue un avantage à double tranchants. Quiconque a vu le monde sait qu’il n’y a plus une seule localité de l’ouest qui ne dépeint nos concitoyens d’une sempiternelle main tendue. Et nous n’avons pas le droit de nous révolter quand le monde nous considère comme un peuple de mendiants et de délinquants car, que nous le voulions ou non, ces derniers ont une visibilité maximum, pas les médecins, les maçons et les ingénieurs qui travaillent honnêtement.

Ce qui est ici tragique est que la politique du gouvernement maintient les citoyens pauvres dans cette situation. Aucun maire du parti au pouvoir ne se permettra de supprimer les aides sociales car la masse des bénéficiaires des aides est la part la plus docile et la plus fidèle de son électorat.

Au niveau national, nos politiciens font tout leur possible pour que ce phénomène issu des campements (din satre) prolifèrent en périphérie, dans les banlieues, dans les petites villes et les régions de petits fonctionnaires. Plus le pays est en retard, plus les chances de préserver cet électorat sont intactes. Je sais que cela ressemble aux directives du KGB pour des pays occupés, mais n’oublions pas que ceux qui nous dirigent aujourd’hui sont issu de cette zone d’influence plutôt que de la démocratie.

Le PSD (parti au pouvoir) est pratiquement invincible avec une masse de deux millions de fonctionnaires et autour d’eux 3 à 4 millions d’affamés qui ne souhaitent rien changer en Roumanie, du moment qu’ils obtiennent un millier d’euros par mois d’aides sans faire grand chose.

Imaginez-vous par exemple qu’un fonctionnaire partant à la retraite à 45 ans avec deux mille euros puisse ne pas voter pour la continuité? Et pas seulement lui, mais tous ses proches, même s’il doit emmener au vote ses vieux parents sur une civière, une perfusion dans le bras…