« Les ingouvernables » : c’est avec ce titre en forme d’équivoque que j’ai présenté mon travail de thèse. Quelle est la question alors? Qui est ingouvernable? Qu’est-ce qui est ingouvernable? Ou bien encore : Comment, par quel procédé de gouvernement est-ce (devenu) ingouvernable ? C’est à la troisième question que j’ai voulu répondre. Et elle permet de comprendre comment se posent par erreur les deux premières…
En fait, je crois que l’expression « les ingouvernables » désigne, dans une équivoque tout-à-fait assumée donc, ce que j’ai observé pendant plusieurs années comme une tentative sans fin de gouverner et gérer la situation des bidonvilles de roms dans l’agglomération lyonnaise (au moins depuis 2005, date à laquelle j’ai commencé à travailler ce sujet) et qui laisse à penser que cette situation est proprement ingouvernable : on aurait tout tenté, mais quelque chose semble résister à toutes (toutes ?) les tentatives de gouvernement.
Durant cette période, entre 2005 et 2012, j’ai observé que s’inventait à tâtons une intervention centrée sur le seul sujet des « roms », qui sont alors devenus, un peu malgré eux, les « ingouvernables » de ces situations de crise (qui ne cessent d’échapper à la puissance publique). Les roms deviennent les auteurs de la situation, « les ingouvernables » donc, sans que ne soient par contre interrogées les politiques de gestion de masse et de sécurisation des occupations précaires qui, elles, semblent pourtant produire de l’ingouvernable.
Est-ce que ce sont les roms qui sont ingouvernables, ou bien la volonté de gérer cette situation de cette manière-là qui ferait que se formule cette expression qui montre et qui désigne: « les ingouvernables » (un peu comme on dirait : « regardez! Ils sont là, vous les voyez, vous aussi? »)
Ce travail questionne alors l’insistance avec laquelle la question des roms se pose et se répète machinalement, et comment on construit avec elle du spécifique en éludant la question du commun.
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